La lettre
Mesdames, Messieurs les députés européens,
Vous allez être amenés à voter en plénière la semaine prochaine sur le
projet de règlement de mise en œuvre de la coopération renforcée dans
le domaine de la création d’une protection unitaire par brevet.
Si le principe du brevet unitaire n’est pas problématique en lui-même,
la proposition actuellement débattue pose de nombreuses difficultés,
tant du point de vue de son applicabilité juridique que de ses
conséquences potentiellement désastreuses pour l’innovation.
Le texte actuel est porteur d’insécurité juridique pour les
entreprises. En mars 2011, la Cour de Justice européenne a retoqué le
projet initial pour incompatibilité avec les traités. La réécriture
par la Commission européenne a été très partielle, et la conformité du
texte actuel avec le droit communautaire est toujours sujette à
caution.
Au-delà de la question de l’insécurité juridique pour les entreprises
l’organisation même de la cour unifiée des brevets interpelle. En
effet, la cour unifiée serait composée de juges « spécialisés » sans
appel ni recours à un tribunal indépendant. Un système de ce type –
qui n’existe pour aucun autre droit en Europe – risque d’entraîner la
mise en place d’une bulle dans laquelle un seul petit groupe de
spécialistes des brevet serait à la fois juge et partie, au détriment
de l’intérêt général et sans intervention de contrepouvoirs.
Le texte devrait encourager une politique de l’innovation forte, et
remettre le leadership politique sur la question des brevets. Il
faudrait notamment reprendre en main le droit matériel des brevets
pour une politique industrielle, exclure explicitement du champ de la
brevetabilité ce qui ne relève pas du droit des brevets, comme les
logiciels, pour assurer la sécurité juridique des entreprises
européennes innovante.
Vous trouverez à l’adresse suivante notre analyse détaillée des
nombreux défauts et problèmes posés par le texte actuel.
Des amendements déposés au texte permettent de corriger ces
défauts. Je vous recommande d’adopter les amendements 52 à 67, en
particulier les amendements 52, 53 et 54, qui assure la sécurité
juridique du règlement et apporter une solution au problème politique
de la gouvernance du système européen des brevets, ainsi que
l’amendement 57 qui exclurait clairement les logiciels de la
brevetabilité. Dans l’éventualité où ces amendements ne seraient pas
adoptés, je vous recommande de rejeter la proposition. Pour le détail
de notre analyse :
https://www.brevet-unitaire.eu/fr/content/recommandations-de-vote-pour-les-amendements-de-plénière
Je me tiens à votre disposition pour toute information complémentaire
et je vous prie d’agréer l’expression de ma haute considération.
Lionel Allorge, président de l’April